Défense de la langue française   
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DLF, n° 293


LE GRAND HÉRITAGE DES GAULOIS de Jacques Lacroix
Yoran, 2023, 256 pages, 15 €
Dans cet ouvrage exhaustif et passionnant, fourmillant d’exemples, Jacques Lacroix se fixe pour objectif de nous rappeler un passé dont les traces restent vives autour de nous, à notre insu parfois, dans de nombreuses occurrences et de multiples domaines de la vie.
Au-delà des clichés, un visage plus véridique de la civilisation gauloise apparaît à nos yeux, non pas dans ses objets ou ses sites, mais dans sa richesse linguistique, reflet des divers aspects de cette culture, et particulièrement dans le trésor des toponymes, gardiens de la vie passée des Gaulois, et présents dans la plupart des régions françaises. L’ouvrage s’attarde aux grandes villes, ainsi qu’aux régions dont les noms parfois célèbres sont en fait et malgré les apparences des noms gaulois latinisés, combattant ainsi le préjugé d’un passé essentiellement romain; mais d’autres influences sont également rendues visibles, celtique, ibérique...
Sont concernés également les massifs montagneux (citons les Vosges – Vosego) et les sommets, les rivières comme un brillant réseau d’histoire, les arbres et les forêts (citons la mythique forêt de Brocéliande), les terres agricoles, les essences sacrées (citons aballo, la pomme, qu’on retrouve dans la cité d’Avallon), et, bien sûr, les peuplades. Les tableaux et les cartes qui émaillent le livre, les exemples et les anecdotes rendent l’analyse distrayante et tangible.
Ainsi, ce livre nous rappelle tout d’abord une réalité que la civilisation de l’objet occulte : la puissance du Verbe qui conserve la Vie et suspend le temps ; il s’adresse à tous ceux qui, sentant frémir à l’occasion d’un nom croisé sur une route de campagne une présence vivante quoique incertaine, éprouvent l’envie de voir s’animer devant les yeux de leur imagination les silhouettes d’un passé sensible qui murmure encore aux portes de la conscience. Et peut-être certains d’entre eux s’émerveilleront-ils, se penchant sur la terre où somnolent les racines du langage, de sentir battre sous leur main le coeur d’un peuple oublié. Roland Voegele

FAIRE LIRE POUR LES NULS. COMMENT PARTAGER LE PLAISIR FOU DE LIRE TOUT AUTOUR DE SOI d’Alexandre Jardin
Éditions First, 2024, 318 pages, 24,95 €.
« Changer le monde gaiement », tel est l’objectif immense, mais non utopique, d’Alexandre Jardin. Avec les livres, tous les livres, cuisine, bricolage, voyage, car seule la lecture est capable de remédier aux désordres de notre époque en tant que médecine anti-violence.
Le plus urgent, s’occuper des plus rétifs de nos ados, pour lesquels le verbe faire prend le sens de « performance ». Le sauveteur Daniel Pennac, convoqué pour son expérience de prof, rappelle sa méthode, la lecture à haute voix, laquelle attise la curiosité et crée du lien entre l’adulte et les jeunes. Mais, pour ceux qui n’ont pas eu la chance d’écouter la petite histoire du coucher dès leur deuxième mois, reste l’embarras du choix entre les déjà classiques Harry Potter, La Planète des singes, Le Petit Nicolas, quelques belles biographies d’aventure, comme celles d’Alexandra David-Néel ou Ibn Séoud, en passant par les BD, mangas et romans graphiques très drôles, Geluck, Goscinny, Kentaro Miura, Riad Sattouf ou Joann Sfar. Ajoutons un long détour par la science-fiction, par exemple, Les Fourmis de Bernard Werber, et quelques polars addictifs comme Le Mystère de la chambre jaune. Et pour les autres, ceux qui lisent déjà avec voracité ? L’auteur propose un programme destiné à « voir le monde autrement », avec une plongée dans la science chez Les Découvreurs de Daniel Boorstin, et un retour dans l’histoire récente avec La Révolution culturelle nazie de Johann Chapoutot. La vision la plus troublante serait cet Atlas des peuples disparus de Dominique Lanni, qui nous rappelle clairement que les civilisations sont mortelles...
Auparavant, l’auteur s’est assuré que nous avons bien dévoré les cinq plus grands romans classiques japonais, russes et américains, allemands, italiens et espagnols également, la littérature française posant un regard particulier sur Marcel Proust « qui ne nous laisse pas intacts », parole sibylline incitant vivement à la découverte. En revanche, Jean-Paul Sartre, qualifié de « petit propagandiste », « petit soldat idéologique », est jugé à l’aune de son attitude politique vis-à-vis de l’URSS. Nous sommes priés de le lire « pour changer d’état d’esprit ».
Mais le véritable cadeau de ce captivant Faire lire (pour des Nuls ayant acquis un niveau culturel impressionnant!), ce sont les visites des bibliothèques du monde, étranges toujours, plus ou moins faciles d’accès. Signalons-en au moins une, en Italie, dans une ville des Pouilles, Lecce. Intitulée « bibliothèque du Bien et du Mal », bâtie au XVIe siècle, deux fois à l’identique, côté ouest la sainteté, à l’est le péché. L’ensemble contient toute la psyché humaine. À voir absolument! Monika Romani

OÙ EST LA FAUTE ? TESTEZ ET AMÉLIOREZ VOTRE NIVEAU DE FRANÇAIS. TOME 2 de Jean-Pierre Colignon
ediSens, « En français dans le texte », 2024, 240 pages, 16 €
« Praticien de la langue française », notre ami Jean-Pierre Colignon a concocté une nouvelle série de tests amusants et efficaces dans le deuxième tome de cet ouvrage à la fois précis et ludique. Accents, traits d’union, déviations, majuscules, ponctuation, prononciation... Ce livre-jeux propose des centaines de questionspièges permettant au lecteur-joueur d’améliorer son niveau de français. Quel est le pluriel de va-nu-pied? Le hibou bouboule-t-il? Comment doit-on prononcer le mot antienne? Au fil de cent rubriques, l’auteur apporte la réponse aux questions issues des multiples singularités de notre langue qui font partie du « bon usage » de celle-ci. Pierre Gusdorf

RAPPORT AU PARLEMENT SUR LA LANGUE FRANÇAISE 2024
La Délégation générale à la langue française et aux langues de France publie depuis 2002 un rapport annuel sur la langue française. Ce rapport est imposé par la loi no 94-665 du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française (loi Toubon).
Le rapport publié en mars 2024 comporte 104 pages et une cinquantaine de chapitres. Ont participé à sa rédaction de nombreuses personnalités dont Amin Maalouf, secrétaire perpétuel de l’Académie française. Les contributions et témoignages rendent vivant un rapport au contenu riche et varié.
L’année 2024 est une année faste avec les Jeux olympiques, le Sommet de la Francophonie début octobre et le 30e anniversaire de la loi Toubon. Ces trois évènements permettront une mobilisation bien nécessaire à la défense de notre langue.
Le rapport ne tait pas les difficultés existantes, en premier lieu celles liées à l’illettrisme; la direction du service national et de la jeunesse du ministère des Armées a dénombré 126 000 personnes en difficulté de lecture sur 760 000 jeunes ayant effectué la journée défense et citoyenneté en 2022. Ce nombre justifie s’il en était besoin les politiques publiques tendant à renforcer l’accès au français. Les secteurs d’affaissement du français restent celui de l’enseignement supérieur, avec la place exagérée prise par l’anglais, celui de la publicité et celui de l’audiovisuel. L’autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) et l’autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) s’efforcent dans un contexte défavorable de maintenir une communication compréhensible « pour garantir le bon accès de l’information de chacun ».
La France est un pays multilingue. Les langues régionales, donc territoriales, voisinent avec des langues non territoriales. Cinq millions de personnes parlent une langue régionale ; les créoles réunionnais, martiniquais et guadeloupéen possèdent respectivement 600 000, 400 000 et 200 000 locuteurs. La transmission des langues régionales passe par l’enseignement. 120 000 élèves suivent des cours de langue régionale.
Moins connue est la langue des signes, dont la reconnaissance est récente (2015). Cette langue est utilisée par 280 000 personnes dont 100 000 en « langue première ».
Enfin les langues non territoriales sont quantitativement dominées par l’arabe dialectal maghrébin (3 millions de locuteurs) le berbère (2 millions), le rromani (215 000 locuteurs) et l’arménien occidental (entre 60 000 et 100 000 locuteurs).
Le rapport au Parlement présente donc une situation contrastée qui invite à l’optimisme malgré le recul marqué de notre langue dans les instances communautaires. des publics adultes.
Franck Sudon

DICTIONNAIRE DES MOTS HAÏSSABLES de Samuel Piquet
Le cherche midi, 2023, 223 pages, 18,90 €
Samuel Piquet, journaliste à Marianne et « plume » du Gorafi, vient de publier un dictionnaire très iconoclaste. Il recense les termes forgés soudainement par notre époque et qui connaissent une gloire éphémère avant de sombrer fréquemment dans l’oubli. Ce sont des vocables « à la signification nébuleuse », produits et reproduits par des communicants soucieux d’être à la mode en partageant les combats idéologiques lancés par la bien-pensance. De « narratif » à « friendzoner », de « nonbinaire » à « résilience », ils pulullent dans l’air du temps et les discours creux. Un livre utile. Pierre Gusdorf

        Signalons aussi :
  • LA BIBLE DU PALINDROME, d’Alain Zalmanski (Éditions Ayamaya, 2024, 508 p., 80 €).
  • * * *
  • PRIS AUX MOTS. DE L’ORIGINE DU LANGAGE À L’ORIGINE DES LANGUES, de Pierre Bancel et André Langaney (Éditions Exils, « Essai », 2024, 336 p., 29 €).
  • POÉSIE DU GÉRONDIF, de Jean-Pierre Minaudier (Éditions Le Tripode, 2024, 224 p., 17 €).
  • DICTIONNAIRE AMOUREUX DE LA TRADUCTION, de Josée Kamoun (Plon, 2024, 560 p., 29 €, liseuse, 19,99 €).
  • MON RÉPERTOIRE DES RÉGULARITÉS ORTHOGRAPHIQUES, de Laura Marie (L’Atelier de l’Orthophoniste, 2024, 132 p., 17 €).
  • LE FRANÇAIS AVEC STYLE, de Karine Dijoud (First Éditions, 2023, 216 p., 16,95 €, liseuse, 11,99 €).
  • Aux Éditions Honoré Champion :
    ABÉCÉDAIRE DE LA FORÊT, sous la direction de Pascale Auraix-Jonchière, Frédéric Calas, Christiane Connan-Pintado, Agata Jackiewicz, Catherine Tauveron (« Champion les dictionnaires », 2024, 400 p., 25 €).
    DICTIONNAIRE DE PIERRE DE RONSARD, sous la direction de François Rouget (« Champion classiques », 2024, 736 p., 28 €).

  • Nos adhérents publient
    • Cousins de Régis Debray et déjà auteurs de plusieurs ouvrages, Anne Charlet Debray et son frère aîné Quentin Debray évoquent la vie, les demeures et autres souvenirs de leurs grands-parents et de leurs grands-oncles et tantes, à Calais ou à Paris, à partir de la fin du XIXe siècle : Debray-sur-Mer. Fantaisie et fugue en sol mineur (Éditions Fiacre, 2024, 124 p., 19 €).
    • Jean Pruvost nous annonce la publication de La Librairie Honoré Champion 150 ans d’expérience. Deux familles pour une grande maison d’édition érudite, qu’il a rédigé pour fêter l’anniversaire de la création de cette maison d’édition, le 9 octobre.
    • Philippe Le Pape a interrogé Martine Mazany, pour la page « Portrait de poète » de la revue trimestrielle Art et Poésie de Touraine (n° 257).
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