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Écrire, selon Aude Denizot
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Le 16 novembre 2023, Aude Denizot
nous a présenté son ouvrage : Pourquoi nos
étudiants ne savent-ils plus écrire ? Les ravages de
la photocopieuse (Enrick B. Éditions, « Le Porte-
Voix », 2022, 124 p., 14,90 €). Nous la remercions
vivement de nous avoir transmis le résumé de
sa présentation.
Les photocopies seraient-elles à l’origine de la baisse du niveau de français ?
De prime abord, ces feuilles volantes et autres fichiers souples ont beaucoup
d’attraits : légers, adaptables et personnalisables à l’infini, ils aident les élèves
à fournir un travail rapide et propre. Mais n’est-ce pas là la beauté du diable ?
Il est vrai que, grâce au fichier, l’élève est dispensé d’écrire tout ce qui est
inutile – l’énoncé, la phrase, l’opération –, de sorte qu’on pourrait croire qu’il
fera plus d’exercices et apprendra davantage. En faisant gagner du temps, le
fichier et la photocopie seraient donc les alliés du système éducatif. Cependant,
rien de ce que l’enfant écrit n’est inutile. La copie de l’énoncé de
mathématiques aide à comprendre le sens du problème, celle de l’opération
permet d’avoir un ordre de grandeur du résultat. Copier la leçon favorise son
apprentissage, de même que cela oblige l’enfant à écrire de nombreux mots
dont il mémorisera peu à peu l’orthographe, et de nombreuses phrases dont
il assimilera la structure et la ponctuation. Et, même quand il écrit
mécaniquement, il aura au moins exercé son poignet à écrire, ce qui lui
permettra, plus tard, de prendre efficacement un cours en notes.
Ainsi, les photocopies ne permettent pas de faire plus d’exercices, puisque,
à cause d’elles, les élèves écrivent plus lentement. De même, l’intelligence de l’enfant est très peu stimulée par ces exercices qui ressemblent à des formulaires
à remplir, avec des cases à cocher, des points à relier, des phrases à trous et
des leçons déjà rédigées. En somme, tout est entièrement déroulé à l’avance
pour l’élève, qui jamais ne décide où il écrira sa réponse, à quel moment il ira
à la ligne et où il placera son opération. C’est pourquoi les cahiers de vacances
et autres outils parascolaires n’ont guère d’intérêt, l’enfant étant
systématiquement placé dans l’attitude passive de celui qui complète un
document déjà conçu pour lui.
Il n’y a pas de raccourci dans les apprentissages. Le sportif et le musicien se
soumettent à un entraînement intensif ; il doit en aller de même pour
l’apprentissage du français. Chaque photocopie est une occasion manquée
d’apprendre à écrire et il faudra, plus tard, beaucoup d’efforts pour rattraper
ce temps perdu.
Certes, il existe beaucoup d’autres causes à la baisse du niveau : la
rémunération des enseignants, la pédagogie, le numérique... Mais la
suppression des fichiers et des photocopies est une mesure simple qui ne coûte
rien. À cet égard, il faut éviter de déculpabiliser l’école en reportant la faute
sur les SMS et les réseaux sociaux. Correctement formés, les jeunes n’écriraient
pas avec autant de fautes sur leur téléphone. Les réseaux aggravent un
problème, ils ne le créent pas. Gageons donc qu’en éteignant les photocopieurs
et en supprimant les fichiers on parviendra à redresser, ne serait-ce que
modestement, la situation bien préoccupante que nous vivons.
Encore faudra-t-il, pour que ce travail d’écriture soit efficace, qu’on apprenne
aux élèves à tenir correctement leur stylo. Sans quoi, victimes du syndrome de
l’écriture coûteuse, leur attention sera entièrement accaparée par le tracé des
lettres et ils ne comprendront rien de ce qu’ils seront en train d’écrire.
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Aude Denizot, née en 1974 à Thionville, est professeur de droit.
Études : École normale supérieure (Cachan), agrégation d’économie et
gestion (1997), doctorat de droit privé, à l’université de Paris-I Panthéon-
Sorbonne (2007), agrégation de droit privé et sciences criminelles (2015).
Carrière : a travaillé dans plusieurs lycées et universités. Professeur de droit
à l’université du Mans et interventions régulières en Amérique latine, où
elle a développé de nombreux partenariats ; membre du laboratoire Themis
université du Maine (depuis 2022).
OEuvres : L’Universalité de fait (Thèse, 2008) ; Responsabilité civile et quasi-contrats :
24 exercices d’application et Pourquoi nos étudiants ne savent-ils plus écrire ? Les
ravages de la photocopieuse (2022).
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