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Éditorial N° 267
« L’apostrophe »
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Notre président a signé, le 2 juin 2016, dans la rubrique « Dire, Ne
pas dire » ce « Bloc-notes » du site de l’Académie française.
Le diable se niche dans les détails, comme on sait. Le plus minuscule
des écarts à la norme trahit parfois une déviation fâcheuse. Voyez
comme la confusion règne désormais dans un usage incontrôlé de
l’apostrophe. Ce signe typographique, comme l’indique la première
édition du
Dictionnaire de l’Académie française (1694), est «
une virgule
que l’on met un peu au-dessus du mot » pour indiquer une élision
vocalique, le plus souvent la voyelle finale de l’article, comme dans
l’oiseau,
l’hôpital ou
l’idée. Le parler populaire en abuse fautivement,
avec des expressions orales comme «
t’es nul » ou «
pauv’crétin »
(version polie). Passons.
Mais voici qu’on trouve çà et là cette horreur : «
à quelle heure
vient’il ? » ou, pire, «
quand se montrera t’il ». Dans le premier cas, le
simple trait d’union s’impose. Dans le second cas la lettre
t, destinée à
éviter l’hiatus, doit s’écrire entre deux traits d’union (-t-). Elle n’a
qu’une fonction euphonique, comme dans
y a-t-il ? On croise aussi
des incongruités, du genre «
que répond-t-il ? » Pourtant, il saute aux
yeux qu’on placera un -
t- entre un verbe se terminant par une voyelle
et un pronom tel que
il, elle ou
on (
pense-t-on), mais qu’on n’aura
aucune raison d’y recourir quand le verbe se termine par un -
t ou
un -
d (
dit-on). Seuls les verbes
vaincre et
convaincre admettent les
tournures du type
convainc-t-il ? car le -
c final n’est pas prononcé,
mais leur usage n’est pas si fréquent.
Car ces flottements, et c’est là que je voulais en venir, finissent par
tout mélanger. Voyez cette affiche d’un film récent qui a eu du succès, sans que personne ne trouve rien à redire à son titre
doublement erroné ! Inversement, ne reconnaissant plus le
pronom réfléchi du verbe s’en aller, on
finit par écrire «
va-t-en »ce qui doit s’écrire
va-t’en. Ce n’est plus une affaire
marginale : confondre la personne (te)
avec une petite consonne qui fluidifie la
langue, c’est grave. Écririez-vous
« je-t-aime » ? Vous seriez éconduit.
Xavier Darcos
de l’Académie française
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