• Siège administratif : 222, avenue de Versailles 75016 Paris • 01 42 65 08 87 • dlf.paris@club-internet.fr •
Éditorial N° 270
Un manifeste:
la Défense et Illustration de la langue française
----------------------------------------------------
Alors que s’achève l’année du soixantième anniversaire de la création
de notre association et de sa revue, nous avons pensé qu’il serait utile
de rappeler l’origine de leur dénomination. Voici, extraites de l’Histoire
de la littérature française*, publiée en 2013 par notre président, quelques
lignes consacrées à Défense et Illustration de la langue française.
Ce manifeste, préparé par un groupe de jeunes lettrés réunis autour
de Ronsard, porte la signature de Du Bellay. Prenant pour prétexte une
réponse à Thomas Sébillet (qui, dans son
Art poétique, défendait l’art de
Marot), Du Bellay et ses amis réagissent très vivement et proposent une
nouvelle théorie littéraire.
À dire vrai, la
Défense et Illustration (1549) fait suite à divers traités,
parus entre 1530 et 1540, qui visent tous aux mêmes buts : épanouir et
enrichir la langue ; créer de nouvelles formes. Du Bellay compile des
idées souvent admises par tous, y compris par ceux qu’il attaque (comme
Marot ou Rabelais). Plagiaire, souvent injuste, Du Bellay a cependant
su créer l’événement et imposer un manifeste qui reflète toutes les
aspirations de son époque. Le débat de fond (créer une littérature qui
soit vraiment « française » , et originale) va conditionner toute l’évolution
de la poésie jusqu’à nos jours. Il s’agit de dire le pouvoir des mots :
chaque langue possède un pouvoir particulier et intraduisible. C’est en
elle que se trouvent toute beauté et toute vérité transmissibles. Si la
langue imite, se répète, s’affadit, si personne ne l’élabore, ne la réveille
ni ne l’enrichit, ce n’est pas seulement la communication entre les
hommes qui s’affaiblit, mais aussi le génie d’un peuple.
Tout l’art poétique va viser à déceler et cultiver la force et la beauté
du français, tout en le réanimant et en le diversifiant : il faut exploiter
toutes les possibilités qui rendront à notre langue « lumière », « énergie »,
« âme » et « ardeur ».
Xavier Darcos
de l’Académie française
* Hachette, 576 pages, 15,20 € (p. 87-88).
Retour sommaire