Défense de la langue française   
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Éditorial N° 273


Réflexions
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Nous sommes très reconnaissants au président de DLF, Xavier Darcos, d’avoir pris le temps d’assister à l’assemblée générale, le 6 avril, et de s’être adressé aux nombreux participants. Florilège.

Je suis heureux de retrouver les uns et les autres autour de Défense de la langue française et de féliciter ceux qui y travaillent toute l’année. Je suis bien conscient des activités soutenues de vos élus, de ceux que vous avez choisis pour animer l’association, notamment par la revue. Je me rends compte aussi du succès de DLF quand je vois le grand nombre de candidats qui se présentent aux divers concours, en particulier La Plume d’or pour les étudiants des Alliances françaises.

Je suis heureux aussi de voir apparaître de nouveaux visages. Il faut que les générations futures se passionnent pour le sujet de la langue française. Et je voudrais donner ici trois éléments d’information ou de réflexion.

Premier élément : ce qui touche à la langue française dans les derniers mois a des résultats que je dirais « contrastés ». D’un côté, il y a un retour d’une forme de militantisme très visible de la part des pouvoirs publics. Pour preuve, la décision du président de la République de créer la cité de la Francophonie à Villers-Cotterêts. Le projet est maintenant engagé, avec beaucoup de moyens et un financement de l’État très important. Dans le cadre de mes fonctions de chancelier de l’Institut, je constate aussi que nous recevons d’organismes étrangers de nombreuses demandes d’aide à la création de lieux de savoir en langue française, ou d’interventions dans les pays où le français existe. Ils sont nombreux à s’intéresser à ce qui se passe autour de la langue française, comme, par exemple, les 15 000 abonnés de Canal Académie, essentiellement des étrangers, un chiffre énorme pour un outil si léger.

Résultats contrastés donc, car nous avons eu de très nombreuses attaques contre la langue française, comme nous n’en avions pas connu depuis longtemps. Je pense, en particulier, à tous les débats sur l’écriture inclusive ; je pense à cette manière de mêler la langue française à des querelles ou à des militantismes – féminisme, question du genre ou autres – qui ne sont pas de notre ressort, au fond. On peut en penser ce que l’on veut, mais la langue française n’a pas à être mêlée à ces querelles. Elle est entraînée dans des sujets qui ne sont pas les siens.

Rappelez-vous, il a fallu que l’Académie française se batte pour que l’on n’ait pas un slogan en anglais, « Made for sharing », sur la tour Eiffel, lors de la candidature de Paris aux JO 2024. « Prêts à partager » va très bien.

Deuxième remarque. Il ne faut pas oublier l’essentiel : la pureté et la puissance d’une langue, son rayonnement intellectuel, son rayonnement culturel et même son rayonnement économique. Question de puissance mondiale, tout simplement.

Lorsque Richelieu a créé l’Académie française, ce n’était pas seulement pour défendre la langue ; il avait l’intuition qu’une langue pure, précise, contrôlée, organisée, peut devenir une langue de communication internationale. Un siècle plus tard, au XVIIIe siècle, l’Europe entière parlait français, comme l’a si bien écrit Marc Fumaroli, grand spécialiste de ces questions. Être défenseur de la langue française, ce n’est pas être un conservateur réactionnaire et effarouché, c’est être le défenseur du français dans le monde et de la France dans le monde. C’est défendre une capacité à faire entendre un mode de pensée, une conception du droit (le droit romain versus la Common Law), une conception des droits de l’homme, une conception de l’écriture et des genres littéraires mêmes. C’est donc un ensemble qui va bien au-delà des querelles locales.

L’Atlas de la diplomatie française montre que partout où le français progresse des marchés se gagnent ; partout où nous établissons des relations culturelles fortes, nous sommes bien présents. Lorsque nous organisons des saisons culturelles dans un pays étranger, ce n’est pas seulement pour parler français, mais c’est aussi pour y être présents avec nos entreprises, nos moyens économiques. Je vous ai déjà cité ce fameux télégramme de Wikileaks : « Méfiez-vous des Français. Lorsqu’ils arrivent à l’étranger, ils vous proposent un roman de Balzac ou un quatuor de Debussy et ils repartent en vous ayant vendu une centrale nucléaire. » C’est exactement cela ! La langue est un moyen d’entrer dans des relations puissantes et sans ces échanges culturels, sans ces échanges linguistiques, il n’y en a pas d’autres non plus évidemment !

Redisons plus souvent et plus systématiquement que ceux qui attaquent la langue, même sur des sujets qui leur paraissent dérisoires, que ceux qui l’affaiblissent ou qui la jetent dans l’arène de conflits politiques ou idéologiques qui ne la concernent pas, nuisent au rayonnement de la France, de ses entreprises, de sa puissance politique au sens le plus large du terme.

Troisième et dernier point. Il sera le plus bref. Pensons, soyons positifs ! En tant que chancelier de l’Institut, j’ai la charge et l’honneur de présider 140 fondations. Derrière cet écran de protestations de personnes qui ne sont jamais contentes et qu’il nous faut supporter à longueur de temps, il y a une multitude d’associations, de fondations, de personnes qui s’engagent. Il y a dans toute la France des trésors de bonne volonté, d’engagement. Il y a ceux qui montent des associations, des organismes à caractère social, philanthropique, éthique même ; ceux qui défendent l’environnement ; ceux qui se préoccupent des enfants souffrant de malêtre, font de l’accompagnement aux devoirs, aident à l’insertion scolaire ; ceux qui soutiennent les initiatives économiques modestes et dotées de peu de moyens. On voit de jeunes chefs d’entreprise qui ont réussi et qui, au mitan de leur vie, se disent : « Il n’y a pas que l’argent qui compte dans la vie, il faut que j’en redonne aux autres » et qui sont prêts à s’engager.

Sachez-le, nous ne sommes pas seuls ! Il faut absolument que nous le fassions savoir et que nous retrouvions dans ce pays l’envie de servir et d'aimer autrui.
Xavier Darcos
de l’Académie française
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