Défense de la langue française   
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Éditorial N° 289


Prix 2023
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C’était le 1er avril 2023, dans l’un des salons du palais du Luxembourg. Notre président remettait notre traditionnel prix Richelieu et un nouveau prix : celui du rayonnement de la langue française.

Nous voici réunis à l’heure de l’apéritif : un mot dont l’étymologie latine signifie « ouvrir », ouvrir l’appétit bien sûr, mais ouvrir aussi les festivités en rappelant combien la langue française est une juste cause doublée d’une belle fête.

Je suis très heureux d’être le président de notre association ; j’ai tenté toute ma vie de promouvoir notre si belle langue, quand j’ai eu l’honneur d’être ministre chargé de la Francophonie et, par la suite, en tant que premier président de l’lnstitut français.
Défense de la langue française est une auguste dame, qui a franchi ses soixante printemps sans se départir de son dynamisme : elle nous rassemblait ici la semaine dernière pour le prix de la Plume d’or et elle nous réunira au début du mois prochain pour celui du Plumier d’or.

Aujourd'hui, nous remettons un prix nouveau-né. Ce Prix du rayonnement de la langue française est « destiné à un organisme qui l’illustre et la promeut ». Le premier lauréat de la liste, qui sera à n’en pas douter longue et fructueuse, est le CAVILAM-Alliance française (Centre d’approches vivantes des langues et des médias), un des centres de référence en France pour l’enseignement du français en immersion et la formation des professeurs de FLE (français langue étrangère).
Michel Boiron, qui avez été son directeur général pendant vingtcinq ans, et Grégory Lasne, qui l’êtes depuis le ler janvier, soyez les premiers récipiendaires de ce prix décerné à votre institution.
Nous remettons également le prix Richelieu qui récompense depuis plus de vingt ans un journaliste « qui aura témoigné, par la qualité de son propre langage, de son souci de défendre la langue française ». ll vous revient cette année, Jean-Michel Djian. Votre riche parcours, qui mêle à de nombreuses publications une filmographie fournie, vous a notamment conduit à être éditorialiste à Ouest-France. Votre femme, Sophie Brocas, préfète et romancière est, comme vous, une amoureuse de notre langue...

Défense et illustration de la langue française n’est pas que le nom d’une association ni une innovation majeure de la fin du XXe siècle. C’est le titre du manifeste de la Pléiade, attribué à Joachim Du Bellay, et paru en 1549. Le nom de notre association est un écho, par-delà les siècles, à la vénération que ce groupe de poètes portait au français.
L’Académie protège, depuis 1635, l’ « immortalité » de notre langue. Ses veillées d’armes se perpétuent dans des temps plus proches de nous :
– ll y a exactement quarante ans cette année, Léopold Sédar Senghor était élu à l’Académie, lui qui inspira le projet politique de la Francophonie. On vous doit sa biographie, cher Jean-Michel.
– Plus proche de nous, l’année dernière, la Coupole accueillait Simon Jolin-Barrette, le ministre de la Langue française du Québec, charge nouvellement créée.
– Et, plus proche de nous encore, pas plus tard que la semaine dernière, consacrée à la langue française et à la francophonie, nous accueillions, à l’lnstitut de France, la ministre de la Culture, Mme Rima Abdul-Malak, pour le cinquantenaire du dispositif d’enrichissement de la langue française, par lequel les pouvoirs publics incitent à la création, à la diffusion et à l’emploi de termes français nouveaux. Pour contrer l’invasion des anglicismes, l’Académie propose sans relâche de nouveaux mots, transformant fake news en infox, mails en courriels ou flyer en feuillet, prospectus, tract, etc.
À cette occasion, une des tables rondes a fait entendre les voix de personnalités du monde de l’entreprise ; vigilantes à l’égard des anglicismes, elles partagent la même flamme que la nôtre.

Ensemble, nous nous protégeons d’un nouveau Babel, nous bâtissons une maison commune et accueillante, c’est-à-dire une langue qui refuse les mots que l’on comprend mal : les anglicismes, les mots hyperspécialisés ou ceux de la langue de bois.
Aimons donc notre langue comme hier le versifiait Boileau, du haut du premier fauteuil de l’Académie française :
      « Surtout qu’en vos écrits la langue révérée
      Dans vos plus grands excès vous soit toujours sacrée.
      En vain vous me frappez d’un son mélodieux,
      Si le terme est impropre ou le tour vicieux :
      Mon esprit n’admet point un pompeux barbarisme...
»
Et nous pourrions ajouter :
« Mes oreilles refusent l’odieux anglicisme. »
C’est avec cet alexandrin maladroit, bien moins élégant que ceux de mon confrère disparu, que j’adresse mes plus vives félicitations à nos lauréats.

Xavier Darcos
Chancelier de l’lnstitut de France
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