Défense de la langue française   
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Une première à New York
(publié dans la revue Défense de la langue française 227 - 1er trimestre 2008)

Des classes bilingues anglais-français dans l’enseignement public

Enquête de Claire Goyer
(présidente de DLF Bruxelles-Europe)

Le Département de l’Éducation de la ville de New-York ouvre ses portes au programme bilingue anglais/ français.

PS 581 : C’est le nom de l’école de Brooklyn, l’une des trois écoles publiques de la ville de New-York où, pour la première fois en septembre 2007, a été lancé un programme d’enseignement bilingue anglais-français. C’est une réalité bien tangible dans la classe de maternelle K2022. Sous la responsabilité de Marie Bouteillon, elle-même bilingue et diplômée de l’Université de Columbia, 24 enfants de cinq ans passent du français le matin à l’anglais l’après-midi avec un parfait naturel. La moitié parle le français en famille, l’autre moitié est anglophone. C’était une des conditions de l’accord du Département de l’Éducation. (DOE3). Grâce à ce programme d’immersion, l’ambition de Marie est d’en faire aussi des bilingues.

Trois années d’efforts :
En amont, il a fallu quelque trois années de travail pour parvenir à ce résultat: L’initiative est partie d’un groupe de parents francophones ou binationaux, soucieux de donner à leurs enfants une maîtrise de la langue, non seulement orale mais écrite. Conscients qu’une grande partie des familles françaises et franco-américaines était démunie des ressources financières nécessaires pour inscrire leurs enfants dans des écoles privées, ils ont créé en 2005 une association : Éducation française à New-York (EFNY). Convaincre le Département de l’Éducation newyorkais du bien-fondé d’un tel programme ne fut pas chose aisée. Car s’il existe déjà des programmes publics bilingues anglais-espagnol ou anglais-chinois qui vont de la maternelle à la terminale, la population francophone ne s’était pas jusqu’à présent mobilisée. Il en fut de même avec le gouvernement français qui, au début ne semblait pas persuadé de la nécessité d’un tel projet, mais qui désormais apporte son aide.

Un rêve devenu réalité

La difficulté fut de trouver un proviseur prêt à organiser cet enseignement dans son école. Ce fut le cas de Giselle Gault-Mc Gee, directrice de PS 58. Ses origines toulousaines ont joué un rôle dans son choix. Elle a parlé français jusqu’à l’âge de 5 ans et regrette de n’avoir pu ensuite bénéficier d’un enseignement scolaire bilingue. L’an prochain sera créé un cours préparatoire et, d’année en année, le programme bilingue couvrira les cinq niveaux de primaire, nous assure-t-elle sans dissimuler les obstacles.

Problèmes de financement et de recrutement :
Catherine Poisson, parent d’élève, coordinatrice des programmes FLAM pour EFNY, et par ailleurs professeur de littérature française à l’Université de Wesleyan, ne nous a pas non plus caché les difficultés de financement et de recrutement. D’une part, les livres et le matériel éducatif coûtent quatre fois plus cher que pour une classe monolingue, d’autre part, les professeurs formés à l’enseignement bilingue ne sont pas légion. De plus, ils doivent être agréés par le Département d’Éducation de la ville de New-York après avoir reçu une certification de l’État de New York. La subvention du DOE ne suffit pas à couvrir les frais de fonctionnement. EFNY compte sur l’aide du gouvernement français, soucieux de fournir aux francophones établis hors de France les moyens de maintenir une bonne connaissance de leur langue maternelle en subventionnant, entre autres, les programmes FLAM (français langue maternelle) de la ville qui se déroulent dans cinq écoles publiques après la journée scolaire.

Des parents d’élèves déterminés. Des pouvoirs publics favorables :
En visitant le site de l’association, au demeurant fort bien fait, on peut se rendre compte de l’énergie déployée sur le terrain par les parents d’élèves. Ce sont eux qui établissent les dossiers, cherchent les financements, les enseignants et proposent des projets aux pouvoirs publics.
L’attitude favorable de ces derniers est à ce prix. Côté français, le gouvernement et les élus ont compris l’enjeu de cette entreprise pour la francophonie : depuis septembre 2007, conseillers à l’AFE (Assemblée des Français de l’étranger) et sénateurs des Français établis hors de France se succèdent à PS 58 et s’activent pour aider ce programme à continuer. L’ambassade de France ne ménage pas non plus son soutien. La reconnaissance s’est cristallisée autour de la diffusion par TF1 d’un reportage sur K 202 au journal de 20 heures le 5 septembre 2007 (à consulter sur le site)

Une école publique bilingue de la maternelle à la terminale : une utopie ?
Prochaine étape : une école publique bilingue de la maternelle à la terminale, un projet à moyen terme, mais semé d’embûches, nous dit Catherine Poisson. Le public ne manque pas, les pouvoirs publics new-yorkais sont ouverts. Restent à trouver le lieu, principale difficulté, un directeur d’école, les financements et les enseignants. Un défi que les parents sont déjà attelés à relever. Gageons que, forts du premier succès, ils ne renonceront pas. Tous nos voeux les accompagnent pour la réussite de cette nouvelle entreprise de longue haleine. Pour en savoir plus, visitez le site http://www.efny.net


1 Public School. Les écoles publiques sont désignées par des numéros
2 Kindergarten (maternelle) et numéro de la classe
3 Department of Education
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