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OUI À UNE CONSTITUTION EUROPÉENNE
NON À UNE LANGUE UNIQUE
Bien que la conférence de Laeken n' ait pas donné expressément mandat à la Convention pour préparer le statut des langues, cette question est au coeur de toute l'architecture de la nouvelle Europe. Ne mériterait-elle pas un groupe de travail de conventionnels conduisant à un article de la nouvelle Constitution ?
Il n'est pas seulement question de préserver la diversité culturelle, tarte à la crème de tout discours officiel, mais bien de rééquilibrer l'usage des langues, notamment dans les institutions, sachant que langues, emploi et rayonnement économique sont liés. Nous voyons avec inquiétude la montée des discriminations linguistiques dans les organisations internationales qui privilégient l'embauche des anglophones de naissance.
Dans le traité d'Union européenne, toutes les langues sont déclarées officielles et le Parlement européen a réaffirmé ce principe en 2001. Néanmoins, on constate que le déséquilibre linguistique s'accentue d'année en année. Si une étude sérieuse n'est pas faite, si un consensus n'est pas trouvé, l'Europe s'orientera vers l'usage d'une langue unique, l'anglais, la langue au moindre coût. N'est-il pas nécessaire de réfléchir aux inconvénients du monopole de fait qui s'installe et de préserver un multilinguisme réel pour que la Convention atteigne son objectif de fonder une Europe proche des citoyens ?
L'adoption - officieuse - d'une langue unique aboutirait à l'appauvrissement de l'Europe, affaiblirait son rayonnement dans le monde et provoquerait tôt ou tard des réactions hostiles à l'Union. Conserver le principe de diversité linguistique dans le travail quotidien des institutions constitue donc un des défis de l'élargissement. La devise de l'Europe n'est-elle pas « l'unité dans la diversité » ?
Les Conseils européens successifs sont restés muets sur la question des langues, entérinant l'Europe des élites, fin prêtes à jouer leur rôle dans le « village mondial », et ignorant l'Europe de la masse, laissée pour compte, désorientée et sans repères, colonisée de l'intérieur. Quelle Europe les pays de l'Est vont-ils rejoindre, eux qui sont contraints par l'Union de négocier en anglais ? Ils se plient à cette exigence (ils n'ont pas le choix) bien que certains aient demandé d'utiliser l'allemand ou le français. Selon l'Eurobaromètre, pour 63 % des Européens l'élargissement signifie que nous devons mieux protéger notre langue. Le réveil sera sûrement douloureux...
L'originalité de la méthode adoptée par la Convention est de se demander ce que veulent les citoyens. Au-delà des moyens institutionnels futurs de l'Union, qu'ils sont occupés à organiser, peut-on espérer que les conventionnels ne passeront pas à côté de la finalité du traité de Rome (article 2): "promouvoir un développement harmonieux"?
Claire GOYER
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